Procès de Jeanne d’Arc : Pierre Cauchon, pion des Anglais ?

Les Anglais confient le procès de Jeanne d’Arc à un Français Pierre Cauchon. Évêque de Beauvais, il est depuis le traité de Troyes en 1420 un conseiller du roi d’Angleterre. S’il subit probablement la pression des Anglais, Pierre Cauchon n’a pas besoin d’eux pour savoir dans quel sens doit déboucher le procès.

Aux yeux de l’évêque de Beauvais, Jeanne d’Arc ne peut qu’être coupable et hérétique. Car, dans le cas contraire, si ses voix sont d’origine divine, si sa mission a donc bien été dictée par Dieu, c’est que Charles VII est le véritable roi de France, que le roi d’Angleterre est un usurpateur et que, lui, Pierre Cauchon s’est complètement fourvoyé.

Un juge scrupuleux

Sûr de lui, l’évêque ne veut pas pour autant d’un procès bâclé et tâché d’irrégularité. Ce serait prêter le flanc aux critiques et donc décrédibiliser le verdict. Les fidèles de Charles VII en tireraient parti. C’est pourquoi le juge se montre particulièrement scrupuleux dans le déroulement de la procédure : le contenu des interrogatoires est consigné, les assesseurs de Cauchon donnent leur avis aux étapes importantes (c’est ainsi qu’on décide que Jeanne ne soit pas torturée), on fait appel à l’université de Paris pour établir la culpabilité…

Comme l’explique l’historien Olivier Bouzy, le «plus souci [de Cauchon] fut de faire un « beau procès« , d’où la longueur de l’instruction. Il procéda avec un soin qu’on pourrait qualifier de maniaque si l’absence de procédure bien définie [en matière de procès d’inquisition] ne laissait cependant une impression de flou et d’improvisation».

Jeanne d'Arc sur le bûcher

Jeanne d’Arc sur le bûcher. Miniature du manuscrit, Vigiles de Charles VII, par Martial d’Auvergne (v. 1470).

Vices de forme

Malgré ces précautions, le caractère irréprochable du procès appelle quelques nuances. Gardons-nous toutefois de considérer la procédure à l’aune des pratiques judicaires du XXIe siècle. Jeanne d’Arc est jugée par un tribunal médiéval, lequel ne donne pas autant de garanties à la défense qu’un tribunal actuel.

Cependant, il est des points sur lesquels Cauchon mérite quelques reproches. En premier lieu, Jeanne d’Arc reste tout au long du procès enfermé dans une prison du château de Rouen, autrement dit en prison anglaise. Or, jugée par un tribunal d’Église, l’accusée aurait dû être maintenue en prison d’Église, en l’occurrence celle de l’archevêché de Rouen. Autre point contestable, les juges ne donnent jamais suite aux appels répétés de Jeanne au pape. Elle en a pourtant le droit ; les juges ne l’entendent pas, ou du moins, font semblant de ne pas l’entendre.

Jeanne d’Arc aggrave son cas

Finalement, le 24 mai 1431, Jeanne d’Arc abjure. Elle reconnaît, au milieu d’une foule nombreuse rassemblée au cimetière Saint-Ouen de Rouen, qu’elle s’est trompée. Elle est condamnée à la prison perpétuelle, au pain et à l’eau. Cauchon est soulagé : c’est Jeanne qui est dans l’erreur, pas lui. La cause de Charles VII est déconsidérée.

Cependant, le lendemain, on appelle Cauchon à la prison. Il découvre une Jeanne revêtue de ses habits d’homme et qui annonce sans trembler qu’elle rejette son abjuration extorquée dans un moment de faiblesse. Dans ce cas, la procédure est claire : tout condamné qui retombe dans l’erreur – un relaps – est abandonné à l’autorité séculière qui doit procéder à la mise à mort.

En l’occurrence, l’autorité séculière c’est le bailli de Rouen, l’Anglais Ralph Butler. De façon expéditive, il livre Jeanne au bourreau. Le 31 mai 1431, la jeune femme brûle devant une foule de soldats anglais et de Rouennais.

Ce dénouement fatal convenait-il à Pierre Cauchon ? Nous ne savons pas mais la mort de Jeanne lui était inutile.

Bibliographie

  • Jean Favier, Pierre Cauchon : comment on devient le juge de Jeanne d’Arc, Paris, Fayard, ‎ 2010.
  • Philippe Contamine, Olivier Bouzy, Xavier Hélary, Jeanne d’Arc. Histoire et Dictionnaire, Bouquins, Robert Laffont, 2012

Laurent Ridel

Historien de formation, je vis en Normandie. Ma passion : dévorer des livres et des articles d'historiens qualifiés puis cuisiner leurs informations pour vous servir des pages d'histoire, digestes et savoureuses. Si vous êtes passionnés de patrimoine médiéval, je vous invite vers mon second blog : Décoder les églises et les châteaux forts

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14 Responses

  1. Jolinar De MALKSHOUR dit :

    Article passionnant mais dont la lecture est parasitée par des fautes d’orthographe difficilement qualifiables de fautes de frappe. Dommage, la lecture en est rendue difficile du fait que l’on se focalise sur elles et que l’on perd parfois le fil de l’idée.

  2. GAMELIN HENRI dit :

    Bonjour
    Vous êtes bien trop gentil avec Cauchon

  3. Jean-Michelle dit :

    J’approuve que la personne qui a rédiger ce texte a été trop gentil avec Pierre Cauchon

  4. Pascal dit :

    À titre indicatif Pierre Cauchon est enterré à l’église Saint-Pierre à Lisieux.

  5. Aurelien Wulveryck dit :

    Merci pour cet article très clair. J’ai une petite question pourquoi les Anglais ont-ils préféré faire juger Jeanne par un tribunal religieux plutôt que laïque? Merci.

    • Laurent Ridel dit :

      Merci. Il importait aux Anglais que Jeanne soit considérée comme hérétique afin que sa mission soit décrédibilisée. Or cette accusation est du ressort unique d’un tribunal ecclésiastique, plus précisément de l’Inquisition.

  6. ISNARD dit :

    Bonjour

    Contrairement à ce que vous affirmez, la procédure des procès d »inquisition était très bien définie depuis le début du XIIIe siècle. C’est notamment depuis les procès d’inquisition que les accusés ont eu droit à un avocat, ce qui a été un procès considérable pour les droits des accusés. L’une des causes de la nullité du procès de Sainte Jeanne d’Arc a été le refus de lui accorder un véritable avocat, c’est-à-dire qui ne fasse pas partie de ses accusateurs.

  7. Isnard dit :

    De plus, ce n’est pas le 28 mai 1431, mais le 24 mai 1431 qu’a eu lieu la scène d’abjuration. Il faut ici rappeler qu’aujourd’hui encore, on ne sait pas vraiment le contenu de la cédule d’abjuration. Celle insérée au procès officielle est fausse: elle fait une cinquantaine de ligne alors que 4 témoins, lors du procès de réhabilitation de 1450 à 1456, affirme qu’elle faisait 6 à 7 lignes ou que le temps de la lire était celui qu’il fallait pour dire un Notre Père. On sait qu’elle s’est engagée à ne plus porter d’habit d’homme, à ne plus diriger de combats contre les Anglais. Rien ne permet d’affirmer qu’elle a renié ses voix. Elle a déclaré se soumettre à l’Eglise, ce qui n’est pas du tout la même chose que se soumettre à ses juges pro-anglais.

  8. Gandobert dit :

    « Autre point contestable, les juges ne donnent jamais suite aux appels répétés de Jeanne au pape. Elle en a pourtant le droit ; les juges ne l’entendent pas, ou du moins, font semblant de ne pas l’entendre. »
    Avant l’abjuration du 24 mai, le tribunal a expliqué à Jeanne son refus de la mener au pape: celui-ci est trop loin et surtout l’évêque a totale autorité pour juger seul en son diocèse.

    « Ce dénouement fatal convenait-il à Pierre Cauchon ? Nous ne savons pas mais la mort de Jeanne lui était inutile. »
    N’est-ce pas s’avancer que de conclure que Cauchon n’avait aucun intérêt à la mort de Jeanne? Les Anglais payaient Cauchon comme ils ont payé tous les frais du procès; et ce sont eux qui ont récupéré Jeanne pour ensuite la livrer à Cauchon. On peut questionner ce que pensait Cauchon en son for intérieur, mais pas vraiment ce qu’il était tenu de faire par les Anglais: à savoir que Jeanne soit condamnée à mort.

  1. 7 octobre 2011
  2. 4 mars 2016

    […] – L’honneur est sauf. Volé à Jeanne d’Arc par l’évêque Cauchon lors de son procès, l’anneau de la sainte, qui était détenu par les Anglais depuis 1431, […]

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